Combien d’expéditions ont abandonné leurs sommets pour en aider une autre ? Il n’y a pas plus de deux semaines encore, le guide népalais Gelje, a arrêté son ascension du mont Everest pour secourir un autre alpiniste, le portant jusqu’à l’épuisement pendant près de 6 heures (article ici) !
Des cas similaires, nous pouvons en trouver des centaines, mais quelle est donc cette puissance qui suscite ces éclats de générosité et de solidarité en nous ? La montagne, dans sa majesté et sa force inébranlable, incarne une entité qui exige respect et humilité. En confrontant l’humanité à ses défis, elle nous rappelle l’importance de la coopération et de l’entraide, des valeurs fondamentales pour notre survie dans ce milieu aussi magnifique que redoutable.
Ainsi, la solidarité se révèle comme le moteur principal de notre survie et de notre prospérité dans ce terrain complexe. Elle est le maillon qui compose nos lignes de vie. C’est elle qui transforme les isolés en communauté, les vulnérables en protégés. Et c’est à travers elle que nous apprenons le respect profond pour la nature, et pour l’humanité qui s’y aventure. L’entraide en milieu alpin transcende la simple notion d’assistance mutuelle : elle devient une philosophie de vie, un engagement à la fois pour soi et pour les autres.
Depuis les premiers pas de l’homme dans les pentes, l’entraide a été une valeur centrale pour la survie et le succès de ces audacieuses aventures. Les montagnes, avec leurs terrains escarpés, leurs conditions météorologiques imprévisibles et leurs risques, ont toujours exigé un niveau d’union et de solidarité important.
Dans les activités d’altitude, la coopération revêt des formes variées. Que ce soit en formant des cordées pour l’escalade, en partageant de la nourriture et des abris lors d’expéditions, ou en portant secours aux personnes en difficulté.
Au-delà de la simple assistance mutuelle, l’entraide en milieu hostile est devenue une véritable philosophie, un engagement moral envers les autres. Les montagnards savent qu’ils peuvent compter sur la communauté pour les aider en cas de besoin, et ils sont prêts à faire de même pour leurs pairs. Cette culture a permis de sauver d’innombrables vies au fil du temps et continue de le faire aujourd’hui.
Il est fascinant de constater que cette tradition d’entraide ne s’est pas érodée avec le temps. Au contraire, depuis les débuts de l’alpinisme, elle s’est renforcée et a évolué, intégrant de nouvelles méthodes et technologies, pour améliorer encore la sécurité et l’efficacité de l’assistance. À l’ère numérique, cette assistance commune prend une nouvelle forme, tout aussi déterminante pour la sécurité en montagne…
Des moyens techniques, humains aux moyens financiers, l’entraide est omniprésente en montagne, en voici des exemples :
Les cabanons de montagne, ces abris, disponibles pour tous les férus de hauteurs, sont essentiels pour ceux qui peuvent se retrouver pris dans des conditions météorologiques extrêmes. Il n’est pas rare de trouver une pièce ouverte racolée aux granges et chalets d’alpages faisant office de refuge de secours. Ils sont souvent équipés avec des fournitures d’urgence comme des couvertures, de la nourriture et des trousses de premiers soins.
De même, les refuges comme ceux de la FFCAM sont révélateurs de cette solidarité, les gardiens, aidés de bénévoles, sont souvent des personnes accueillantes et dévouées. En plus d’organiser le confort et des plats généreux pour les résidents, ils seront capables de les informer sur des parcours, la météo et les risques des lieux. Sur le site, on peut retrouver cette volonté que “… ces bâtiments contribuent à une pratique responsable de la montagne, dans une logique de développement durable.“. Ils nous montrent ainsi que la pratique s’inscrit dans un contexte global prenant en compte le futur de nos interactions.
En hiver, au sein d’un groupe, le premier skieur ou randonneur se charge de tracer un chemin sécurisé dans la neige pour faciliter l’ascension de ses compagnons. Ces traces peuvent ensuite être utilisées par d’autres, ce qui facilite leur progression (attention cependant, ce n’est absolument pas un gage de sécurité que de suivre une trace…).
Les cairns, ces petits tas de cailloux, présents sur les sentiers, fruit du passage de randonneurs, qui juste avec ce petit geste de placer une pierre sur une autre, créent de véritables indications pour retrouver son chemin.
Les cordées en alpinisme : les alpinistes s’attachent souvent ensemble à l’aide d’une corde pour plus de sécurité. En cas de chute de l’un d’eux, les autres membres de la cordée peuvent le retenir et ainsi lui sauver la vie. La cordée d’escalade est par ailleurs une belle symbolisation de notre solidarité, certains l’appellent même le « lien sacré de la corde ». Et, « à quoi servirait un premier de cordée qui s’envolerait allègrement vers les sommets, si la corde était cassée et ses équipiers en perdition ? » a dit le prêtre Michel Quoist dans Construire l’homme, nous montrant encore une fois que la corde tisse un lien fort entre les grimpeurs avec laquelle ils vont plus loin. Un exploit ne se fait jamais seul et résulte d’un travail d’équipe fort, cette expression est même reprise (peut-être à tort) dans d’autres milieux, comme la politique ou l’entreprenariat.
Les organisations de secours en montagne, sont parfois assistées par des bénévoles, et, sont un exemple parfait d’entraide. Ces hommes et ces femmes sont prêts à risquer leur vie pour venir en aide à des personnes en difficulté.
Lorsqu’un danger tel qu’une avalanche menace la sécurité d’un individu ou qu’il est en situation de détresse les personnes se trouvant dans les alentours n’hésitent pas à venir porter secours. Le fait que de nombreux skieurs hors-pistes et de randonnée portent un Détecteur de Victimes d’Avalanche (définition plus bas) non seulement pour eux, mais aussi afin de sécuriser d’autres potentielles victimes d’avalanches, nous montre que porter assistance à autrui fait partit de notre adn.
En France, le secours en montagne est essentiellement assuré par des services publics, puisque les opérations de sauvetage sont avant tout menées par les Pelotons de Gendarmeries de Haute Montagne (PGHM), par des membres des Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS) spécialement recrutés, ainsi que par des sapeurs-pompiers (sénat.fr). Ainsi, la solidarité française permet de secourir des milliers de personnes chaque année.
On peut aussi penser à la levée de fond qui a permit le sauvetage incroyable d’Elisabeth Revol et de Tomek au Nanga Parbat en 2018. Si l’on connaît l’issue fatale pour Tomek, on sait aussi combien cette chaine humaine à l’international, financée par une vaste opération de crowdfunding et relayée sur le terrain par de “simples alpinistes” a permis à Elisabeth de revenir vivante de l’enfer de la très haute montagne…
Chaque exemple démontre que l’aide en montagne ne se limite pas à des actions individuelles, mais s’inscrit dans une culture et une organisation plus larges.
Des technologies modernes de détresses viennent complémenter les solutions de détresses et de secours plus traditionnelles :
Le Détecteur de Victimes d’Avalanche (DVA) est un dispositif de localisation de secours qui émet des signaux radio pour aider à retrouver les victimes d’avalanche. Il est très couramment utilisé dans les sports de montagne hivernaux (ski en hors-piste, ski de randonnée, raquettes, …), et est très souvent associé avec d’autres outils du pack avalanche (DVA, Pelle, Sonde).
Le système RECCO est une technologie utilisée par les équipes de secours pour localiser rapidement les personnes perdues. Il utilise une technologie radar pour détecter les réflecteurs RECCO qui peuvent être intégrés dans les vêtements et les équipements de plein air. Hors station, il peut ne pas être déployé par les secouristes.
Les radios, qui permettent une communication directe et rapide en cas de besoin, même dans les zones où la couverture mobile est inexistante.
Ou encore, une technologie développée à Grenoble pour localiser les victimes d’avalanches grâce au bluetooth de leurs portables. Cela permet de localiser une personne même si elle n’est pas équipée d’un DVA ou d’un réflecteur RECCO, malheureusement la distance de recherche est relativement limitée.
Et enfin, la balise d’alerte LYNKX, qui est une innovation majeure en matière de secours en montagne. LYNKX a développé une balise d’alerte et une application mobile qui offrent un réseau de secours basé sur la communauté en cas de besoin. La balise LYNKX+ intègre une technologie radio qui transmet l’alerte à vos proches mais qui surtout sollicite les autres balises à proximité, augmentant ainsi les chances d’une assistance rapide. L’application BIVOUAK, quant à elle, offre un moyen pour les randonneurs de partager leurs itinéraires et leurs activités en temps réel, augmentant la sécurité générale.
Imaginons que vous êtes en train de faire une randonnée en montagne seul, dans une zone reculée et sans réseau mobile. Soudain, vous tombez et vous vous blessez gravement, vous n’êtes plus en mesure de vous déplacer et vous êtes dans l’incapacité d’appeler à l’aide. C’est dans ce genre de situation critique que la balise d’alerte LYNKX+ devient un outil essentiel.
Grâce à sa technologie de pointe, votre balise sera en mesure de déclencher une alerte automatiquement en détectant votre immobilisation. Elle enverra alors votre position précise à tous les utilisateurs de balises LYNKX et de l’application BIVOUAK situés aux alentours. Si par un concours de circonstances il n’y a personne à proximité, les secours pourront quand même localiser votre position et venir vous chercher. Sans la balise, il serait difficile pour les secours de vous retrouver, surtout si vous êtes dans une zone difficile d’accès ou reculée, que les conditions de visibilité sont mauvaises (brouillard, neige, nuit…).
Ces différentes technologies modernes sont des exemples de l’évolution de l’entraide en montagne. Chacune de ces solutions répond à un besoin spécifique et peut être utilisée en complément des autres pour renforcer le réseau de secours. Que ce soit pour permettre une localisation plus précise des victimes d’avalanche ou pour assurer une communication fiable dans des zones éloignées, ces innovations technologiques jouent un rôle crucial dans la sauvegarde des vies en altitude.
Attention, toutefois ces solutions modernes permettent aux secours de parvenir plus rapidement et d'être plus efficaces sur les lieux de l'accident, mais ils ne remplacent pas pour autant les mesures de sécurité et la connaissance des techniques de base. De même, méfiez-vous des sur-accidents.
Pour conclure, l’entraide dans nos massifs est un élément crucial pour la survie et le succès de ceux qui se lancent dans l’aventure de l’altitude. Elle se manifeste sous de nombreuses formes, allant de l’assistance physique directe à l’utilisation de technologies de pointe pour améliorer la sécurité et l’efficacité des secours.
En plus de ces actions individuelles et collectives, la coopération est également facilitée par des infrastructures dédiées, qui offrent un abri et des ressources essentielles à ceux qui se trouvent dans le besoin.
Avec l’avènement de l’ère numérique, l’entraide a pris une nouvelle dimension. Des technologies innovantes, comme le DVA, le système RECCO ou la balise LYNKX, permettent une assistance plus rapide et plus efficace en cas de besoin. Elles ne remplacent cependant pas l’importance de la connaissance des mesures de sécurité de base et de la préparation adéquate.
Nous vous invitons donc à embrasser pleinement cette philosophie lors de vos aventures en hauteurs, que ce soit en prêtant main forte à vos pairs ou en utilisant les technologies de secours disponibles pour augmenter votre sécurité. De plus, en adoptant des innovations comme LYNKX, vous contribuez non seulement à votre propre sécurité, mais aussi à celle de toute la communauté des montagnards.
Enfin, il convient de souligner que porter assistance en montagne n’est pas seulement une question de survie immédiate, mais aussi de pérennité de nos activités. Dans un contexte de changement climatique et de pression croissante sur nos milieux, l’entraide doit également se traduire par une pratique responsable et durable de la montagne. En conjuguant solidarité, respect de la nature et innovations technologiques, nous pouvons tous contribuer à un futur plus sûr et plus respectueux de notre environnement.
L’entraide à l’ère numérique, loin de dénaturer la tradition d’assistance mutuelle sur les pentes, l’augmente et la rend encore plus pertinente. Il ne tient qu’à nous de l’adopter et de la faire évoluer pour le bien de tous.
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En ski de randonnée, le DVA, Détecteur de Victimes d’Avalanche a longtemps été considéré avec la pelle et la sonde comme la référence en matière de sécurité, l’émergence de nouvelles solutions d’alerte suscite un débat essentiel. Regardons de plus près son efficacité et la complémentarité de ces innovations avec les systèmes de sécurité existants. Quel regard porter sur ces technologies ? Elles promettent une couche supplémentaire de sécurité, mais soulèvent également des questions.
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